Soccer
Retour19 juillet 2023
Marie-Christine Gaudreau - mcgaudreau@medialo.ca
L’Association Régionale de Soccer Lanaudière se mobilise pour ses arbitres
Campagne de sensibilisation
©Photo Marie-Christine Gaudreau
Mya Gagné, Jasmin Laberge et Anas Ariouat ont tous vécu ou vu des actes d'intimidation ou de violence en exerçant leurs fonctions d'arbitre; des gestes qu'ils déplorent et qu'ils se réjouissent de voir condamner par l'ARSL.
Du 2 au 9 juillet derniers, l’Association Régionale de Soccer Lanaudière (ARSL) tenait sa première Semaine de l’arbitrage. Par cette initiative, l’Association dénonçait les comportements intimidants, les violences physiques et verbales dirigées vers les officiels; un phénomène en croissance dans le milieu sportif. Pour ce faire, l’ARSL s’est dotée d’un chandail portant des messages clés s’adressant à l’ensemble de la communauté sportive; joueurs, entraineurs ainsi que spectateurs.
Pour mieux saisir l’ampleur de la problématique, l’Hebdo Rive Nord est allé à la rencontre de jeunes arbitres au parc Maurice-Richard, à Repentigny. Il est 18 h. Le soleil est bien présent et la chaleur est toujours accablante. Alors que nous discutons avec Victoria Lafortune, coordonnatrice à l’arbitrage, Jasmin Laberge, Mya Gagné et Anas Ariouat, arbitres respectivement âgés de 18, 17 et 14 ans, quelques joueurs seniors s’activent déjà sur le terrain en s’échauffant pour le match qui débutera à 19 h.
Comme partout ailleurs, on nous informe que la pénurie de main-d’œuvre sévit aussi dans le milieu de l’arbitrage. Les conditions sont devenues difficiles. Plusieurs jeunes passionnés, qui ont le désir d’apprendre, répondent toujours présents, mais non sans peine. « On sait que la violence auprès des officiels existe et on essaie de mettre des actions concrètes en place pour y remédier. La ligue senior est notre ligue la plus problématique », admet avec désolation la coordonnatrice, Victoria Lafortune, désignant les joueurs frappant des ballons un peu plus loin. Avec un grand nombre de matchs simultanés pour cette ligue, beaucoup d’arbitres mineurs sont sollicités pour y participer. À leur grand dam, en tant que jeunes arbitres, leurs appels sont plus souvent qu’à leur tour remis en question, contestés et critiqués, par les joueurs adultes qui n’ont parfois pas la langue dans leur poche.
©Photo Marie-Christine Gaudreau
Victoria Lafortune, Mya Gagné, Jasmin Laberge et Anas Ariouat.
Des outils pour vaincre le fléau
« À travers nos rencontres préparatoires d’arbitres à l’ARSL, on nous montre beaucoup de trucs pour ne pas se laisser intimider ou influencer par des propos qui peuvent être désobligeants à notre endroit de la part des entraineurs, des joueurs ou même des parents. On a une belle base pour tenter de rester concentrer dans notre match, mais reste qu’il faut avoir une bonne carapace pour faire ce métier, parce que ce n’est pas facile pour personne », explique Jasmin Laberge. Celui-ci constate que sans influencer leur décision, les jeunes arbitres sont souvent confrontés au doute lorsque vient le temps de donner un carton rouge, par exemple. « Si j’appelle une telle décision, est-ce que je vais me le faire dire d’une manière impolie ? », évoque-t-il. Une affirmation que confirme Anas Ariouat, 14 ans. Le jeune homme en est à sa 2e saison d’arbitrage cet été et les quelques fois où il a été appelé à arbitrer au centre, il avoue avoir craint de donner le fameux carton rouge. « Je sais que je suis mineur donc, j’ai peur que ça dégénère. Je sens que je n’ai pas le contrôle du match. »
Bien que rien ne soit ni parfait ni gagné dans le dossier de la violence envers les arbitres, Jasmin, Anas et Mya se réjouissent de constater les efforts qui sont déployés par l’Association Régionale de Soccer Lanaudière pour la sécurité de leurs arbitres, mais également pour améliorer leur expérience sur le terrain.
« Aujourd’hui, on arrive avec une idée plus concrète visuellement; un chandail qui frappe davantage l’imaginaire », soutient Victoria Lafortune en lien avec la campagne des chandails. Cette offensive s’ajoute à d’autres mesures telles que le système de points éthiques pénalisant les mauvais comportements et le badge de l’arbitre mineur sanctionnant plus sévèrement les joueurs qui s’en prennent, de quelconque manière, à un arbitre identifié mineur. Sans avoir le pouvoir de freiner tous les comportements inadéquats, ces mesures ont démontré leur effet.
« C’est agréable de savoir qu’il y a des moyens pour que les gestes et les propos violents arrivent moins souvent. Les messages sur nos chandails sont parfaits pour attirer l’attention des plus vieux, qui sont aussi les plus concernés », estime Mya Gagné, qui mentionne avoir eu la chance d’être peu ciblée par ces gestes d’intimidation dénoncés depuis qu’elle œuvre sur le terrain.
©Photo Marie-Christine Gaudreau
Du 2 au 9 juillet, tous les arbitres de l’ARSL portaient leur chandail à l’effigie de la Semaine de l’arbitrage lors de tous les matchs.
Propos sexistes
Tous n’ont toutefois pas la chance de Mya. Si on pense souvent à tort que la tendance est révolue, les propos sexistes sévissent encore sur les terrains de soccer. « On est beaucoup moins de filles arbitres que de garçon, constate la coordonnatrice. J’en suis à ma sixième année d’arbitrage donc, des commentaires, j‘en ai eu de toutes sortes. L’année dernière en senior masculin, alors que j’étais au centre, je me suis fait dire de retourner arbitrer des filles. » À ces mots, Victoria Lafortune avoue avoir été désarçonnée. Elle ne pouvait concevoir qu’on dénigre ainsi son travail, elle qui offre de son temps pour une maigre rémunération un beau dimanche soir d’été.
« C’est rare que des joueurs seniors osent s’approcher de nous physiquement, mais ils vont utiliser la parole pour nous crier des injures », déplore-t-elle. Dans de tels cas, et, peu importe la forme que prend la violence témoignée, le mot d’ordre est toutefois bien clair pour les arbitres : « Dès que vous ne vous sentez pas bien, que vous ne vous sentez pas en sécurité, vous arrêtez le match et vous allez à la maison. Jamais on ne va reprocher à un arbitre d’arrêter un match parce qu’il ne se sentait pas à l’aise dans le contexte où il était. »
Enfin, les quatre arbitres sont unanimes : l’intimidation se voit autant de la part des joueurs que des entraineurs et des parents dans les estrades. Le message qu’ils souhaitent véhiculer est simple : « nous sommes tous humains, nous sommes en apprentissage et nous avons droit à l’erreur ».
Avec cette première Semaine de l’arbitrage, l’ARSL espère contribuer au changement de culture dans le milieu sportif, qui légitime encore trop aujourd’hui l’abus envers les officiels.
L’Association Régionale de Soccer Lanaudière rappelle que si vous êtes témoins d’un comportement inadéquat envers un arbitre, il est de votre responsabilité de le dénoncer. L’aide de tous est nécessaire pour rappeler qu’aucun abus verbal ou physique n’est toléré.
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