« Rien n’est décidé ! », a tenu à rassurer d’entrée de jeu le maire de la Ville, Steve Plante. Pour ce dernier, il était tout simplement inconcevable de tenir à l’écart des discussions les principaux intéressés, susceptibles d’être affectés par les impacts d’un futur changement de vocation. En ce sens, l’ensemble de la population a été convié à des soirées de consultation où quelque 150 résidents ont participé à des échanges visant à recueillir les inquiétudes et les souhaits liés aux différents scénarios sur la table.

Si plusieurs rumeurs laissaient croire aux citoyens qu’un développement résidentiel pourrait éventuellement s’installer face au Domaine-des-Deux-Lacs, à l’est de la route 341, Steve Plante a démenti ce scénario. « On devait donner l’heure juste aux gens en leur disant que cette option n’existe pas. C’était très important pour nous de mettre les gens au courant en amont de la démarche afin de leur permettre de participer à la démocratie citoyenne. »  

Deux scénarios

C’est donc à l’occasion de ces rencontres que les participants ont pu en apprendre plus sur les scénarios envisagés pour donner une deuxième vie à la sablière. Les vocations résidentielles et commerciales n’étant ni encouragées ni souhaitables en regard des orientations gouvernementales en matière d’aménagement du territoire, deux seules options demeurent sur le radar de la municipalité pour la suite des choses; soit le statu quo ou la revalorisation industrielle.

Vidée de la quasi-entièreté de son sable, la Sablière 341 reçoit maintenant quotidiennement des camions venus disposer de terre de remplissage. Dans un scénario de statu quo, où le site conserve son zonage industriel extractif, ce type d’activité perdurera au moins pour les 20 à 30 prochaines années, a exposé le maire aux invités. Si ces activités constituent pour certains riverains un irritant, notamment en raison des émanations de poussière, de la boue et de la terre échapper sur la route par les camions et de la crainte de voir des terres contaminées y être déposées, l’établissement de nouvelles industries à cet endroit ne serait pas non plus exempt de conséquences. Une réflexion s’imposait.

Moment charnière

Alors que la MRC de L’Assomption est en processus de révision de son schéma d’aménagement et que la CMM procède à une étude dans le cadre du programme de revalorisation des espaces industriels, la Ville de L’Épiphanie a saisi l’opportunité d’engager une démarche afin d’évaluer le potentiel de développement de cet imposant terrain. « On ne fait pas partie de la CMM, a précisé Steve Plante, mais on est la seule ville d’une MRC dont toutes les autres villes sont dans la CMM. Nous sommes donc inclus dans cette recherche d’espace [industriel]. On a déjà exprimé notre souhait d’avoir un espace industriel à l’intersection de Payette / 341, derrière le Shell, où on a déjà acheté les terrains, et il y aurait un potentiel pour la sablière. »

Les espaces disponibles pour le développement industriel se faisant de plus en plus rare dans le secteur, ce projet d’envergure représenterait, s’il est réalisé, une opportunité évidente de création de richesse et de valeur à L’Épiphanie.

Préserver la quiétude

« Il faut prendre en considération qu’il y a un domaine résidentiel à côté, a toutefois mis en garde le maire Plante. Il ne faut pas l’oublier, car ce seront les premiers impactés. De l’autre côté, nous avons aussi un des joyaux de L’Épiphanie; le terrain de golf. Il faut nécessairement protéger ces endroits-là pour qu’ils conservent leur quiétude. »

Représentant la majorité de l’audience à chacune des soirées, les résidents du Domaine-des-Deux-Lacs ont en effet exprimé des inquiétudes quant au bruit, à la pollution, aux odeurs et à l’utilisation de produits susceptibles de contaminer le sol et les eaux souterraines. La pression supplémentaire sur le réseau routier local, entre autres par le transport lourd pour alimenter les industries, a également soulevé les questionnements. À ce titre cependant, le conseil municipal a pu informer les citoyens qu’une étude de circulation était en cours afin de brosser un portrait de la situation. De plus, la présence d’un quartier industriel au nord de la ville engendrerait essentiellement une circulation à sens contraire du trafic durant les heures de pointe.

Retombées positives

Somme toute, les discussions intervenues lors de ces soirées ont démontré une ouverture de la part de la population à voir germer une zone industrielle dans la ville. Les termes écotechnologie, entreprises vertes, zéro émission, développement durable et emploi à valeur ajoutée ont animé les débats autour du type de paysage industriel souhaité à L’Épiphanie par les citoyens. Ceux-ci ont par ailleurs témoigné de leur désir de conserver une importante bande tampon de chaque côté du projet afin de réduire au minimum les nuisances occasionnées et d’assurer la quiétude des résidents riverains, de même que des villégiateurs.

« Dans un monde idéal, je pense que les gens auraient aimé avoir un certain mix; un peu de résidences, un peu d’industries pour répondre à la demande locale. Cette alternative n’est toutefois pas sur la table… mais on se reposera la question dans 15 ans » laisse planer Steve Plante.

Entretemps, le scénario industriel, évoque-t-il, porte aussi avec lui ses avantages. En plus de permettre un accroissement des revenus de la Ville qui aurait pour effets d’alléger le fardeau fiscal des propriétaires résidentiels et d’améliorer les services aux citoyens à moindre coût, l’implantation d’un quartier industriel favoriserait l’acceptation du périmètre urbain demandé à cet endroit, et ainsi le passage des infrastructures d’eau potable et d’égout au Domaine-des-Deux-Lacs.

Bien qu’il reste encore des gens à consulter dans ce dossier, « on se dirige vers une tendance où la majorité des gens au Domaine-des-Deux-Lacs désirent avoir des infrastructures, dévoile le maire de L’Épiphanie. Il y a une tangente là-dessus. Si on conserve le statu quo, le tuyau, ils seront seuls à le payer. » Cet investissement de quelques millions de dollars, essentiel à tout nouveau développement à L’Épiphanie, serait plutôt en partie assumé par les entreprises à venir s’installer dans le parc industriel, advenant sa réalisation.  

Un pas devant

Si ce récent exercice constitue un pas de plus vers l’avant pour la revalorisation de la Sablière 341, ce n’est pas de sitôt que l’on verra poindre les industries. Dans un scénario réaliste, le maire de la ville estime qu’il faudra attendre de 8 à 10 ans pour accueillir les premières entreprises, « quoi que tout pourrait débouler ! »

Chose certaine, le conseil municipal s’octroie un an afin de statuer de manière finale sur ses orientations quant à l’utilisation du site de la sablière. En attendant les recommandations de la CMM, il poursuivra ses réflexions quant au modèle d’espace industriel qu’il pourrait accueillir. « Nous allons visiter des parcs industriels, voir avec quels types d’entreprises on a des atomes crochus et au contraire avec lesquelles nous n’en avons pas du tout. » D’autres consultations auprès des citoyens sont également prévues au fil de l’avancement du dossier.