Santé
Retour09 octobre 2024
Marie-Christine Gaudreau - mcgaudreau@medialo.ca
Le premier jour d’une nouvelle vie
©Photo gracieuseté - Louise Martin
À 51 ans, Louise Martin vivait à la fois la pire et la plus déterminante épreuve pour la suite de sa vie.
Cancer du sein. L’onde de choc. Trois mots qui heurtent, qui chavirent. La Repentignoise Louise Martin se souvient les avoir entendus résonner dans son esprit déjà rongé par l’ennui. Mais, contre toute attente, plutôt que de l’enfoncer dans la déprime, le diagnostic fut le catalyseur de sa renaissance. Plus que jamais, Louise Martin voulait vivre. Non, elle allait vivre.
C’était il y a 18 ans déjà. Mme Martin, alors âgée de 51 ans, était allée passer sa première mammographie. Rien ne laissait présager qu’un cancer la rongeait de l’intérieur. Pas de masse ni de douleur; rien à signaler.
« J’étais déprimé. J’étais dans une période où ça n’allait pas bien pour aucune raison. Ma vie tournait en rond. Je n’avais pas de chum, pas d’enfant, je n’étais plus tellement bien à mon travail. Je me demandais ce que je faisais sur la terre. Sans farce, j’étais tellement déprimée que je souhaitais mourir. Je n’étais pas suicidaire, mais je me disais que si je mourais, ça ne changerait rien », raconte Louise Martin au sujet du mal qui la hantait avant son diagnostic.
Le cancer aurait pu être la porte de sortie qu’elle attendait, mais au contraire, il fut le premier jour d’une nouvelle vie meilleure. À un tel point que Mme Martin se souvient aujourd’hui de cette année de lutte comme l’une des plus belles de sa vie.
« Ça m’a sauvé la vie », déclare la survivante. En plus de lui faire réaliser qu’elle ne souhaitait pas véritablement en finir avec la vie, le diagnostic l’a amené à s’entourer et à trouver du plaisir au quotidien, même si cela passait par des rendez-vous médicaux, des traitements et des groupes de soutien pour les gens touchés par le cancer.
« La dynamique a changé. J’étais joyeuse, pleine d’espoir et je voyais le monde autrement. Je sortais dehors et je voyais la nature. Je ne regardais pas les arbres avant », se rappelle Louise Martin. Le monde était beau à nouveau. Elle souriait à la vie, aux gens qui croisaient sa route avec une plus grande sincérité que jamais, et ce, alors qu’on lui envoyait sa plus importante bataille.
Course à obstacles
Il serait néanmoins faux d’affirmer que le chemin dans l’ensemble eut été facile. Le cancer du sein venait inévitablement avec son lot de craintes, de mauvaises surprises et de deuils. La trajectoire devait être plutôt simple pour Louise Martin. Détecté tôt, le cancer qui l’affligeait serait facile à éradiquer, disaient les médecins. Ce ne fut pas le cas.
Du retrait d’une toute petite masse cancéreuse lors d’une première opération, on doit finalement ramener Mme Martin sur la table d’opération pour retirer la totalité du sein; le cancer s’étant propagé à la manière d’une toile d’araignée. « J’ai été vraiment révoltée. J’ai été un mois enragée noire contre le Bon Dieu. Je disais que jamais je n’accepterais mon corps qui était mutilé », confie-t-elle.
Mais, toujours, elle voulait vivre. De retour au bloc opératoire le jour de son anniversaire, le 11 octobre, elle se répète les mots de son médecin : « Je sauve des vies, pas des seins », pour trouver le courage d’avancer. C’en serait fini ensuite.
Malheureusement, elle n’était pas au bout de ses surprises. Trace de cancer dans les ganglions. Retour sur la table, pour une troisième fois en autant de mois. Louise Martin s’efforce de garder le cap sur le bonheur. Elle accepte les défis et les surmonte un à un. Elle complète ses traitements de chimiothérapie durant l’été, au terme desquels elle renoue avec sa féminité en subissant une nouvelle opération, cette fois-ci de reconstruction.
Les complications la guettent encore. « J’ai fait un rejet de ma prothèse. J’ai failli m’empoisonner », décrit-elle. Les antibiotiques peinent à contrôler l’infection. On doit retirer la prothèse. « C’est comme si on m’avait enlevé le sein deux fois. C’était dur pour le moral. Je n’avais plus de peau, je n’avais que des cicatrices. »
« J’étais joyeuse, pleine d’espoir et je voyais le monde autrement. » - Louise Martin
©Photo Depositphoto
S'entourer d'amour et de personnes positives a aidé Louise Martin à garder le moral durant son combat contre le cancer du sein.
L’importance de s’entourer
À ce stade, Louise Martin explique qu’elle s’est habituée aux pépins. « Ça ne finissait jamais. On aurait dit que je m’étais endurcie. Des problèmes, amenez-en, je suis capable d’en prendre », s’était-elle convaincue.
Puis, elle s’était bâti une petite armée; une garde rapprochée pour cultiver l’amour et l’espoir qui lui permettaient de tenir debout. Sa famille et ses amis étaient bien sûr de ceux-là. « J’ai pris les devants, lance-t-elle. Je me suis dit que tout le monde allait avoir peur de m’appeler, qu’ils ne sauraient pas quoi me dire. Qu’est-ce que tu dis à quelqu’un qui a le cancer ? Alors, j’ai appelé tout le monde et je leur ai dit que j’aurais besoin d’eux, de jaser. »
Inspirée d’un film, Mme Martin a demandé aux gens qui comptent pour elle de lui offrir des objets en tout genre à l’effigie d’un ange. « J’avais des anges tout partout et chaque ange représentait une personne qui me l’avait donné. J’étais entourée de tout ce monde-là et ça m’a aidé beaucoup. »
Donner au suivant
Mme Martin a également trouvé amour et réconfort auprès des groupes de soutien. Chez Cancer-Aide Lanaudière, elle a découvert une deuxième famille qui l’a soutenu au fil des étapes de la maladie. Si bien que 18 ans plus tard, à 70 ans, même si le cancer est derrière elle, Louise Martin continue de s’impliquer pour la cause.
Elle participe aux rencontres mensuelles organisées au Centre à nous et accepte régulièrement des jumelages avec des personnes nouvellement diagnostiquées d’un cancer dans le but de briser l’isolement et de les aider à cheminer dans leur nouvelle réalité. « Ma récompense c’est quand on me dit « ça m’a tellement fait de bien de te parler, tu m’as tellement aidé » », partage Mme Martin avec émotion.
Et si elle donne beaucoup, la survivante soutient qu’elle s’enrichit tout autant de ses échanges avec les autres membres. « J’apprends encore beaucoup. Il y en a qui ne s’en sortiront pas et ils sont tellement positifs malgré tout », admire-t-elle. Chose certaine, elle ne se passerait plus de sa famille de Cancer-Aide. « Quand on a le cancer, c’est difficile parce qu’on ne veut pas accabler nos proches, mais on a besoin d’en parler. En venant au groupe, on se libère. […] C’est un groupe indispensable », résume Louise Martin, ajoutant qu’on y trouve aussi son lot de plaisir grâce à des activités et à des échanges sur une panoplie d’autres sujets que la maladie.
Comme quoi une mauvaise nouvelle, aussi imposante que celle de la maladie, peut parfois changer les perspectives et donner un nouveau sens à la vie.
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