Culture
Retour29 octobre 2024
Marie-Christine Gaudreau - mcgaudreau@medialo.ca
Trouver la beauté dans l’imperfection
Forêt pour deux pianos
©Photo gracieuseté - Six Média
Roman Zavada a composé son plus récent album en pleine nature et au fil des quatre saisons.
Roman Zavada se qualifie de pianiste de terrain. Il n’envie rien aux musiciens de studio en quête de perfection. Au contraire. C’est dans l’imperfection qu’il laisse poindre ses plus belles mélodies. Au cœur de la nature, il donne vie à des œuvres musicales riches et atypiques qui font sa signature. Le pianiste présentera les morceaux de son dernier album, Forêt pour deux pianos, au public repentignois le 3 novembre prochain, alors qu’il sera de passage au Théâtre Alphonse-Desjardins (TAD).
« Je me mets dans des situations ou des endroits inusités pour composer et enregistrer », explique le pianiste d’origines québécoise et ukrainienne, Roman Zavada, en guise de présentation. Son plus récent projet est d’ailleurs né d’un laboratoire en forêt où il a laissé s’enraciner deux pianos; un piano droit et un piano à queue.
Au fil des saisons, Zavada s’est laissé inspiré par la nature et sa musique ambiante pour créer de nouvelles pièces. Le froid, la chaleur, le vent, la pluie, le pépiement des oiseaux, le craquement des branches; le défi était de taille. « Souvent, dans un contexte de studio, le piano doit être parfait, les micros placés à la perfection, l’acoustique parfaite. Là, je fais tout le contraire, rigole le musicien. Je prends les pianos tels quels et j’essaie de trouver une composition, une mélodie, une musique qui est belle. »
Nature silencieuse
C’est finalement à la tombée du jour, là où le calme s’installe momentanément sous les arbres que Roman Zavada a mis le doigt sur ce qu’il recherchait. « Je cherchais le silence qui s’installe, précise-t-il. Oui, on entend parfois des petits bruits, les craquements des branches, la forêt qui respire. C’est très organique comme expérience parce que le silence n’existe pas à la perfection, nulle part. Mais, nous avons trouvé les moments propices pour enregistrer, quand le calme s’installe et qu’il y a comme une sérénité qui s’installe aussi autour. »
Au sens du pianiste, cette connexion avec la nature ajoute une sensibilité différente à l’œuvre de celle que l’on parviendrait à créer à l’intérieur. « J’ai découvert ça surtout dans le Grand Nord, où j’avais l’ouverture du ciel autour de moi avec les aurores boréales qui dansaient pratiquement toutes les nuits », détaille-t-il.
En effet, son précédent album, Résonances Boréales, a été composé et enregistré dans les Territoires du Nord-Ouest, avec les aurores boréales en toile de fond. Tout petit face à l’univers, Zavada trouve dans l’attention qu’il porte à l’environnement une source d’inspiration au pouvoir ressourçant.
Dès sa tendre enfance, le pianiste a découvert le sentiment d’abandon à la musique dès qu’il posait les mains sur les touches d’un piano. Il faut dire que sa mère, elle-même pianiste, l’a initié à cet art très jeune. Et bien qu’elle l’ait préparé pour le conservatoire, Zavada a continué d’être attiré par ce côté intuitif qui brûlait en lui et qui le précipitait hors des sentiers battus. À l’âge de 4 ans, le musicien en herbe préférait déjà la composition à l’interprétation. Il n’y avait pas de sens à la musique sans création.
©Photo gracieuseté - Six Média
L’artiste utilise la projection pour transporter le public dans son univers lors de ses concerts.
D’hier à aujourd’hui
Forêt pour deux pianos propose d’ailleurs une incursion dans le passé de l’artiste qui y dévoile des enregistrements datant de 1988, alors qu’il avait à peine 6 ans. « C’était très très simple à l’époque, ç’a bien évolué, mais quand même j’avais des structures qui commençaient à se former », remarque-t-il.
« C’est un peu un spectacle où je partage un peu ces périodes-là avec le public. Bien sûr, c’est le dernier album principalement, mais je fais des détours dans tous mes projets pour mettre en contexte qui je suis et d’où je viens, parce que j’ai un parcours atypique très différent de celui des autres pianistes. Je vous amène dans ma créativité à toutes les époques, à toutes les tranches d’âge », poursuit Roman Zavada.
Le pianiste amène même avec lui un peu de cette nature qui l’inspire tant. Grâce à des jeux de protections visuelles, il installe sur scène un décor qui rappelle la forêt, où tout a commencé pour son plus récent projet musical.
« J’ai aussi échantillonné - ç’a été tout un travail ! - chacune des notes du piano. J’ai enregistré à plusieurs intensités différentes chaque touche du piano à queue à l’extérieur », s’exclame-t-il. Lors de l’interprétation de deux pièces, il utilise son clavier pour transporter le public dans son univers, au cœur de la forêt. « C’est une autre expérience sur scène que celle de l’album, mais je vous amène dans toutes sortes d’émotions très variées », conclut Roman Zavada.
Quand la musique remplace les mots
Depuis plus de 20 ans, Roman Zavada laisse aussi sa marque en animant les films muets de sa musique. À l’ombre des regards, il donne le rythme à l’image, il permet aux personnages de prendre vie et à l’émotion de rejoindre les spectateurs. « Quand on va voir un film, le piano s’efface, mais je suis pourtant très important », soutient-il. Chaque été, l’artiste offre cette expérience cinématographique hors du commun au public dans les parcs et les écoles un peu partout dans la province.
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